et alors

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Marie-Rose LORTET
Plasticienne Textile

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Marie Rose LortetlortetblancMarie Rose LortetlortetblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMR LORTETblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie Rose LortetblancMarie-Rose-LortetblancMarie-Rose-LortetblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblanclortetblancMarie-Rose-LortetblancMarie Rose LortetblancMarie-Rose LORTETblanc© photos Marie-Rose Lortet & Louve Delfieu

Vit et travaille à Vernon


La vie s'élabore et se tisse de fils fins, parfois elle est cousue de fils blancs, d'autres fois elle se construit de cotons de couleur. Si la curiosité est notre alliée, fortunés nous serons pour apprécier et nourrir les sentiers de la création. Guidés par cette avantageuse complice et tous nos sens, nous nous apercevrons alors que les entrelacs, les nœuds, les tissages, les tresses et toutes choses entremêlées nous côtoient depuis toujours, sous une forme ou une autre.
Éléments végétaux, racines, lierre qui grimpe vers la lumière des cimes, troncs de glycine qui s'enroulent jusqu'à l'étouffement. Lorsque l'on croise les doigts, c'est déjà un tricot, même le nœud entrelacs des serpents endormis nous annonce l'amorce d'un tissage. De la boucle rebelle à la tresse, il n'y a qu'un geste. Embrasser, s’enlacer, c'est tresser des liens.
Au fil de la vie, Marie-Rose Lortet nous indique son chemin particulier, reflet des mailles de ses jours, incitant nos connexions neuronales vers le complexe tissage qu'est la mémoire. Dans son travail, on retrouve l'instantané du regard qui transparaît aussi dans les poèmes de Kandinsky (klânge) et ceux de J. Prévert, portant un regard sur des images de couleurs qui semblent naïves, mais ou le sujet et les petits moments de la vie quotidienne établissent de véritables trésors structurels.
Tout peut être tissé ! Peu importe le matériel, un nid d'oiseau, c'est la poésie magistrale du tissage et de la récupération. Chanvre, plastique, épluchure, fil électrique, papiers de chocolats, fil de fer des bouchons de Champagne, pour Marie-Rose Lortet, tout est le résultat d'un long procédé de fermentation créative ou toute chose, à un moment ou à un autre, resurgira, et sera utilisée.
Elle passe son temps en faisant des tresses. Il n'est pas rare de la rencontrer dans un transport en commun avec du fil dans les mains ; elle ne tue pas le temps, elle le gagne, elle l'élabore, elle le prépare, elle le tresse. Jean Dubuffet eut du flair lorsqu’en 1969, il s'intéressa et encouragea cette petite Alsacienne à la chevelure de sainte Marie-Madeleine.
Aux prémices de la naïveté et de la jeunesse s'élaborent « les masques » pour effrayer et calmer les mauvais esprits de l'inconnu. S'ensuivent les longues épopées des « territoires de laines » où les mailles par accumulations formèrent soudain des boursouflures, des excroissances, naquirent « des montagnes dévoreuses de fenêtres… » les araignées ne font pas de fausse maille. Débuta alors, l'époque des fenêtres, petites constructions délicates où se mêlent l'ancien et le nouveau pour nous offrir d'autres horizons. Puis s'érigèrent les sublimes architectures de fils : "paysage cérébral ", architectures de nuages, matérialisation des associations mentales, oeuvres rares dans l'histoire de la sculpture car peu d'artistes ont travaillé ainsi l'intelligence du vide avec autant de brio. C'est la "sculpture réinventée ", où l'on oublie la masse matière pour laisser place à l’âme. Ce n'est ni le poids ni la mesure qui fait l'œuvre sinon l'espace qu'elle nomme, par ses vides. La poésie première des mémoires de la rétine.
Avec la maîtrise la plus précieuse et l'acquis de tant d'écritures textiles, elle passe des grands formats aux miniatures en « tricotant à l'épingle » des habits bigarrés pour les rêves inouïs des souris oubliées et chassées de nos demeures. Souris des champs en habits de ville. Vêtements de pluie pour des souris aviateurs.les mimiques sont des clins d'oeil qu'elle fait à son époux Jacques Lortet (1 946/2005) unis dans le trait millénaire du pinceau et de l'ajout de la mimique de fils. La trace de l'intention picturale, rehaussée d'un sourire.
Avec « les petits Fragonards » les personnages semblent s'évader hors du cadre. Le personnage devient principal, il s'échappe, plus défini que jamais ; comme réalisé. Ce qui, autrefois, se perdait, se confondait dans un décor onirique et enfantin, aujourd'hui se dessine et s'émancipe vers une nouvelle maturité. Dans les mains de cette artiste particulière, tout peut être tissé, cousu, tressé, emmêlé.
Ariane ne devrait donc pas trop laisser traîner son fil car au hasard d'une rencontre avec Marie-Rose Lortet celle-ci risquerait de s'en emparer, et de multiplier les possibilités de trouver un chemin vers la liberté.
Aurélien Lortet — Carmona, mai 2009

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lortetblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LortetblancMarie-Rose LoretblancMarie-Rose-Lortet-141blancMarie-Rose LORTET "Paroles de parchemins"blancMarie-Rose LORTETblancMarie-Rose LORTET "Mais je rêve"blancMarie-Rose-LortetblancMarie-rose LortetblancDuo, sculpture de Marie-Rose LortetblancMR LortetblancMR LortetblancMR LortetblancMR LortetblanclortetblancMarie-rose LortetMarie-Rose-Lortet-141blancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTETblancVinyl Event, sculpture de Marie-Rose Lortet © photos Marie-Rose Lortet
C'est le temps déraisonnable qui rythme les longs cheminements à travers boucles et noeuds, de mon travail. C'est une façon de construire simultanément le fond, les signes et le dessin qui s'y inscrivent, se fabriquent en même temps que l'écriture se développe.
L'existence de ce fond intervient, se déroule au fur et à mesure que la pensée dicte les mots. C'est une acrobatie sans filet.
Marie-Rose Lortet

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LortetblancMarie-Rose LORTETblancMarie-Rose LortetblancMarie-Rose-LortetblancMarie-Rose-Lortet-141blanclortetblancMarie-Rose LORTET "Tricologie monacale"blanc© photos Clovis Prévost

J'en parle à ma fenêtre…" LA CAROTTE STENDHAL FAISAIT SCANDALE "

Robe de fête pour jour de faîte quand c'est rétrospective, expo ou visite chez elle M.R.L. aux chevelures-architectures d'Andromède attrape-lumière, chez toujours la petite fille unique au monde, au destin de pomme de terre nattée corsetée… Samedi 2 mai 2009 la très nageur rageur Marie-Rose me reçoit, radis rosés glacés au vinaigre, veau bourguignon, délices pâtissiers : la carotte Stendhal faisait scandale. Elle est fine gourmande d'images en enfilades, de fils, de flots, de mots, de couleurs. Elle est gentille bien arrosée aux vins de Porto, d'Alsace, d'Anjou, du Castillon, des Deux-Sèvres ? Tirée à quatre épingles, habit de ville pour souris des champs, elle est donc blanche quelquefois noire, corbeau d'or foulard extra, aimant photos-souvenirs chaussures bizarres Le Rouge et le Noir. Et bande à part, elle grignote tricote le Carnaval du bon cochon, le chèvre cendré des faces géantes, des profils perdus minuscules, les muscles, les macles, pendouille les P'tites têtes en l'air, picorepicole des fillettes, des souris Piccolomini sculptées aux épingles, qui lui donnent depuis le début monnaies du pape, amis, euros, plaisir.

Entre-temps, il faut bien vivre, bien se tenir à table, "Spanferkeln" petits cochons de lait !, rue des Rosés, rue des Rossignols : " Encore un peu de verdure ? Vous reprendrez bien un peu de mon Tockay et de mes bordures au Bic de France, quelques petites ordures de ma timbrologie ? " Elle tortille son maillechort de laine de soie de coton, dévide de soi son ordinaire, sa graine, son chemin du milieu, s'embrouille, bredouille, grisouille ses méandres, croît et croit aux sorcières, aux jeteurs de sorts mal-aimés, aux fous de jardin mouillé, mais aussi aux gris-gris moqueurs porte-bonheurs, beaux masques, sourires de photomatons, petits chats timides étonnés, aux Grand Pin de Cézanne, buissons ardents médusés, gros yeux hilares délicatement féroces "Mords-moi mais pas trop fort". Ses tricots-mascarons couleurs envoyées ou gréés bien arrimés encadrés au carré, et grandes voilures les 627 têtes du mur…

Elle est jolie, très polie, dit le personnage vraiment content, pas très politique mais polissonne avec ses crânes chauves genre Jean Dubuffet comme culs-de-jatte, bittes rigolardes : des détricotages de ficelles nattées, des "Spätzie" dirait-on, plus courts que leurs frères Spaghetti, plus costaux et plus gros car aux vingt minutes culinaires obligées, comme le canard à la rouennaise, doublement cousus solide partout. "Fais attention à la cuisson" : pour une minute d'inattention, mille mailles perdues et le trou-trou du filet, rien dedans qui poisonne ou frissonne. "Un accroc coûte sang franc" murmurait-on dans mon enfance.

Et elle torchonne à s'y méprendre, chiffonne mouchoirs bleus mystérieux, mouchoirs rosés disparates semés de sable d'étoiles aux déchirures d'écritures : des manuscrits, des petits Fragonard suggère Aurélien, ratatinés raidis à l'acrylique en métamorphose, géraniums sauvages et myosotis coagulés bleuets et coquelicots de Monet ? Vernon est près de Giverny, il suffit de passer le pont. J'en parle à ma fenêtre…

Et Marie-Rose tête en l'air passe par la fenêtre sur le champ du grand blanc de pissenlits à tout vent, mottes de taupes à perte de vue : la multitude de ses maisons de vent et dentelles, vibrations d'araignées et baves de miel. Et dans une atmosphère de nuées suspendues, ses justaucorps attrape-cours oiseleurs prédateurs de nos émotions, enveloppes de nos battements ailés éperdus, libellules prises aux mailles des cages. Le corps est un animal… Voyage en apesanteur, envolée depuis la prairie verdoyante : au loin des laissés-pour-compte, le laisser-aller de la mer…

Petite poule prise au piège, " au mois de mai, fais ce qu'il te plaît ? ". File doux s'il te plaît. Dimanche 3, mois des roses, mois de Marie : elle prend le train pour Dieppe ses mouettes et ses galets, point de feston point de boutonnière, elle crochète, point de doute tisse son nid de sirène, pond ses œufs les tient dans l'ombre les caresse du bec. Elle tient tête et corps sage, et allait et ira les clouer aux murs des centres culturels de Tournai en Belgique ou d'ailleurs rue d'Amour : ses oboles en tentacules, ses orphelins aux épingles tremblantes, ses maillages à discuter et partir. Mais "les déménageurs arrivent de Niort ce mercredi, je ne peux pas te recevoir, j'emballe tout avec Jany". Elle fumasse pour un tableau aux bagues de cigares et papiers de chocolat roulés en canivet : là une complicité avec Jacques, ton Pépé le Moko en allé en liesse et fumée dans la Vie, le tresseur-sculpteur graphiste au fil des jours d'osiers et marsaults brise-vents, te laissant sa joie, John Cage, Joe Cocker, son jazz fidèle. Sans lui pas de gabarits, pas de Pont de Garabit, " The willow weeps for me…" Lui et toi son Épousée, un merveilleux tableau inachevé. "Je suis née Rue des saules, sa musique me fait avancer ", le Bouvier dans le ciel d'été, à la rencontre chaque année de la Sainte Marie-Madeleine, la grande Mariée de fil Lionne, la constellation solaire de tes soixante-quatre ans bientôt.

Monde hors du monde…"Les fenêtres l'été s'ouvrent et communiquent…" Coïncidences. La bibliothèque pétrifiées montagnes dévoreuses, l'âge de nos géologies, leurs resurgissements sur textiles anciens, tranche de granit pantère, le rocher-tortue, géographie d'incertitudes…, tes territoires de laine et grands évanescents de fil aux chromatismes de brume nous pénètrent. Un trouble émoi dans l'École de Niort aux paléontologies et paléographies de musée, qu'ils sèmeront aux grandes vacances avec tes pas-laid-du-tout et tes pas-vaut-un-liard liés. Quoi y voir ? Qui voir, monsieur ? Qu'y a-t-il devant derrière, madame, mademoiselle ? À chacun son île. Rêverez-vous ? À chaque sillon son aiguille, ô gué, ô gué.

Elle Marie-Rose écoute, rit, parle, perle ses mimiques, rosé aux joues, rouge aux lèvres, verre à la main, bagues aux doigts, sparadraps aux ongles : Gare au fil électrique enrobé de plastique ! À la bagarre ! Tête à l'envers, elle déroule sans fin son périple entortillé de reliquaires : serais-tu des coupeurs de têtes ou des témoins créateurs passeurs de rêves ? Canardière ou éclusière ? À la guillotine ! À la guillotine, le réel ? Passeur de cap…
Histoire d'histoires, jusqu'aux confins de tes rides hautes, ton œuvre c'est du transparent séducteur fragile, tes poèmes chauds de laine, réseaux habillés, rideaux de percale, le lac de tes yeux, tes traversées tes passes en nuées, nuages noceurs annonceurs de pluie de neige, et le tapis sous la table où se réinventer, receleurs receleuses de Sel. Des oreillers à s'envoyer au ciel, médiumniques à la manière de Raphaël Lonné ? Barques dans les vagues, lecture à en laisser traîner ses ailes par terre grisée libertine aux vrilles des vignes rue de Vignevielle, ivre dans le bleu-nuit musical d'une tricologie monacale au long cours : quarante ans de vie d'Artiste, Rose Tatouée, cru médaillé Niort 2009. Ce n'est pas rien, c'est magnifique. Ne pas jeter sa veste aux orties !
Claude L. Prévost — 8 mai 2009

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Marie-Rose Lortet, artiste filante

Pendant toute son enfance, elle construit des objets avec des matériaux hétéroclites. Dans les années soixante, elle réalise des œuvres avec des tissus cousus et brodés, qui seront remplacés peu à peu par des morceaux de tricot. Lorsqu'elle rencontre Jean Dubuffet, à l'âge de 24 ans, le maître perçoit d'emblée la force et l'originalité de son travail. En 1978, ses œuvres intègrent la collection « Neuve Invention » du musée d'art brut de Lausanne, collection créée en marge du musée d'art brut et de l'art institué. La même année, elle commence à construire des œuvres dans l'espace, avec une technique de fils rigidifiés. Ses œuvres sont blanches : Vêtement de pluie, La maison de l'attrape-lumière…
La couleur apparaît ensuite dans des œuvres de grand format, plus abstraites, comme Tranche de granit panthère, Le rocher tortue ou Géographie d'incertitudes.
Aujourd'hui, Marie-Rose Lortet est une artiste reconnue : ses œuvres ont été sélectionnées à la biennale internationale de Lausanne (Suisse) en 1979, à Szombathely (Hongrie) en 1980, à Betonac-Sint-Truiden (Belgique) en 1988, où elle reçut le premier prix, et à Kyoto (Japon) en 1994, où elle fut également primée.
Marie-Rose Lortet tricote des masques, des paysages. Ses « Territoires de laine » sont de longues histoires tricotées, au jour le jour, d'un seul tenant. Les titres sont poétiques et évocateurs : Mon oreille est une tête, Insomnie à trois yeux, Les immeubles en fuite, Montagnes dévoreuses de fenêtres…
Marie-Rose Lortet nous entraîne dans des voyages fantastiques, imaginaires ou rêvés. Parfois de petits formats magnifiquement parés viennent compléter cet univers féerique profondément humain et généreux : Cétoine dorée en habit queue-de-pie, Habit de ville pour souris des champs, Vêtement pour oiseau migrateur…



À la serre des Jardins Bleues

Lortet, jardins des  Fermes Bleuesblanc© photo Simone Peulpin
Mon étrange rencontre avec le fil “Canatex” ?
Une façon de mettre le nez dehors, d’affronter la pluie et de l’apprécier, de regarder la lumière et le soleil.
Pour mes doigts, habituées à des fils plus souples, plus doux, plus précieux… Ce matériau semblait au départ un peu “récalcitrant”, “rébarbatif”, d’autant qu’il offrait une gamme limitée de couleurs : blanc cassé, écru, ocre chaud, brun foncé, vert pale grisé.
Alors, j’ai ajouté des couleurs de récupération, des “trouvailles” collectées au fil du temps, des choses bizarres, insolites, qui auraient dû être jetées ! Depuis longtemps.
De chaque rencontre, d’un “objet désuet” et de mes “tresses de canatex”, devait “obligatoirement” résulter “un petit miracle”, une histoire, un sens.
Chaque invention donnait d’autres idées, ainsi de l’un à l’autre : mes masques Les attrapes Lumières ont constitués une sorte de troupe, comme une troupe de théâtre ou de cirque (il y a d’ailleurs un clown), ces personnages installés dans la serre des Jardins bleus d’Uttenhofen avaient l’air de guetter les visiteurs en les interpellant joyeusement.
Ils ont provoqué de beaux échanges avec le public !
Marie-Rose Lortet — Vernon, décembre 2008

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Marie-Rose LORTET Plasticienne Textileblanc© photos Marie-Rose Lortetblanc© photos Marie-Rose LortetblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTET Plasticienne Textileblanc© photos Clovis Prévost & Louve Delfieu

« D'un simple fil, une œuvre d'art est née »
Une de mes premières pièces s'appelle Le cerveau tricoté. Tresses et tricotages à l'aiguille ou à l'épingle, tout revient, en cycle, depuis des années que je fais 5 à 6 pièces en même temps, petites ou grandes que rarement je ne finis pas… ou que je finis lentement dans un même souffle toutes ensemble. J'ai toujours des pistes à suivre, je ne me donne pas le temps, à tort, d'une récréation… Les journées doivent être bien remplies, je veux en faire plus qu'il n'est possible de faire, évidemment je n'y arrive pas. Et pourtant j'ai l'impression que la vie m'accorde le temps de faire… emportée que je suis par la couleur. Trois palettes de couleurs et seulement 200 histoires à raconter…
De ces mouchoirs, déchirés, rigidifiés, j'entoure la chose, je trouve l'endroit où je peux sortir, rebondir et raconter. La mariée s'enfuit, je voulais en faire le dos de l'autre, En tournant la tête, mais trop grande, elle s'adapte à moi, je m'adapte à elle…
Ce sont les restes, les sédiments d'une faille résultante d'un bouleversement géologique. De cette terre morte, inerte, on essaie de provoquer un resurgissement, un geyser. Le nageur-rageur va rebondir, s'en sortir au-delà des mers, il a de la chance !
Au début, il n'y a strictement rien, ni fond, ni réceptacle, juste un lacet et un point. Avant qu'un masque, silencieux ou bavard, soit signification de visage, ce sont de grands territoires, des parcours, des vues d'avion, des champs, qui progressivement, tout au long du récit que je me fais à moi-même, deviennent une œuvre unique de réseaux de rides, les sillons que creuse (gràwe en alsacien, grabados en espagnol) le grave.
Je fais toujours des divisions à partir de 13 ou 14 fils pour arriver aux trois brins de la tresse, celle qui me permet de travailler où que je sois et de faire des provisions, partout, partout…
Ça m'accompagne, ça m'emmène loin… Il y a des tissages et tressages africains dans lesquels un fil se détache pour que le regard trouve la clé qui le fera rentrer dans l'histoire. À côté du tricot, dans mes Territoires de laine, la tresse me donne
une autre façon de parsemer la couleur, l'une en pousse une autre dans des parcours labyrinthiques…
Ma devise est d'aborder tout nouveau langage d'une manière inhabile, pour toutes les expériences de fils que j'appréhende, que je ficelle. Ne pas abandonner une idée au vol, mais la saisir, la ligoter, l'en-magasiner ! Butiner sur toutes les pistes et affronter la difficulté d'emmener tout au but sans m'essouffler.
Réflections sollicitées par Natalie Mei pour le fascicule « Temps Irraisonnables » (extraits) © DMC 2012 © photos Louve Delfieu

On parle d'art textile pour qualifier le travail de Marie-Rose LORTET, dont la démarche relève de l'Art BRUT. Son enfance est marquée par les « tricotages » de sa mère et de sa grand-mère. Très jeune, elle travaille dans l'atelier de haute couture à Paris et réalise des couvertures « brodées » pour la presse et l'édition. En 1967, ses « ouvrages » sont remarqués par Jean Dubuffet qui lui achète quelques pièces. En 1976, elle reçoit une commande du couturier Ungaro d'un plastron en petites tresses destiné à un célèbre mannequin. Rien de tel pour prendre confiance et s'enhardir dans la création ! Elle fabrique des vêtements miniatures dont « les manches sont plus adaptées aux ailes des anges qu'au bras des mannequins », puis confectionne des petits tableaux de laine et de bouts de tissu. Dès 1978 son travail sera intégré dans la collection de l'Art Brut à Lausanne. Ainsi débute le cheminement de Marie-Rose LORTET à travers la laine, le fil et la maille.
« Le tricot permet à la pensée et à l'imagination de prendre le temps de voyager et de créer des images… Je ne tricote pas, je raconte seulement avec des brins de fil et de laine. » À partir de quelques mailles, un monde s'ouvre et chaque rangée de tricot entame une nouvelle aventure. L'ouvrage, d'un seul tenant, se resserre, se distend, se boursoufle, une nouvelle couleur prend le dessus et c'est un paysage vu d'avion qui se dessine, avec ses chemins et ses rivières, ses plaines et ses vallons. Difficile de dire où est le commencement, où est la fin, l'œuvre s'étire, prend de l'ampleur sans respecter la géométrie du cadre. Ces « Territoires » se développent au gré de la fantaisie, annexant les ratés, la maille qui file, l'épaisseur de la laine, la finesse du fil… On est loin de l'ouvrage de dame qui tricote utile ! Les « P'tites têtes en l'air » comme le « Théâtre de têtes » nous rassurent quant à la diversité de l'humain !
« Moi je suis fâchée avec les emmanchures », les vraies, celles des mannequins. Alors Marie-Rose LORTET imagine des « Miniatures », vêtements « pour aviateur au sol », « pour oiseaux-migrateurs », « pour souris » qui prennent la forme de petites sculptures rigides, fines, légères et délicates, tricotées au point mousse avec des épingles !
Les « Architectures de fil » occupent l'espace par leur transparence, leur évanescence. Ces maisons-courant d'air sont des pièges à rêves, des filets de papillon qui laissent la pensée vagabonder sans jamais lui barrer la route avec des frontières opaques. Dentelles, guipures, tresses de coton, s'incrustent dans des réseaux de fils noués, à l'image d'une araignée dont le programme de fabrication serait détraqué. Ces résilles captent la lumière, et projettent sur les murs des graphismes étonnants. Les « Fenêtres », assimilables à des planches de graphismes, sont plus calmes et plus sages car presque respectueuses de l'orthogonalité. On retrouve la même impression de poésie et de délicatesse dans « La Suite Incertaine » composée de 88 masques en fil blanc de la taille d'une main, tricotés au point jersey et qui grimacent de concert sur un panneau blanc. « Les Géologies » en maille et tissus fins, parfois peints ou teints offrent des personnages éclatants de couleurs douces et de finesse dans leur étui de plexiglas. « Les Attrape-Lumière » en fil Canatex mêlant des fils de téléphone s'évadent vers le jardin.
Cette exposition offre un éventail large des créations de l'artiste. Son parcours est fait d'aller et retour dans les thèmes qu'elle explore ; ils ne constituent pas une chronologie, mais des activités différentes qui équilibrent ses journées. Ainsi peut-on voir dans sa maison-atelier, de nombreux ouvrages différents en cours car la pensée de Marie-Rose est « étoilée » ; elle clignote, elle scintille Marie-Rose a le pouvoir de se démultiplier et de mener plusieurs tâches de front avec une organisation et une lucidité étonnante qui reflètent une grande exigence de soi.
Tricoteuse de l'inutile, Marie-Rose LORTET transcende une activité domestique féminine et l'inscrit dans le ciel de l'imaginaire et de la création qui donne tout son sens à la vie. Anto Alquier 2012


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Recto Verso pour Vice Versa
Marie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileblancEt moi M-R LortetblancMarie-Rose LORTET Plasticienne TextileMarie-Rose LORTET Plasticienne Textileblanc© photos Marie-Rose Lortet
Re-Naissance 2013 Mon père Recto Verso, Ma Mère Recto Verso, Et Moi Recto Verso, La tortue amoureuse d'une soutis Recto Verso.

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Expo Marie-Rose Lortet 2014 vue par Stéphane L'hôte




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Œuvres dans les collections

        
         L'ART BRUT à LAUSANNE collection « NEUVE INVENTION » (Suisse) (CH)
         LA FABULOSERIE à DICY / YONNE (F)
         COLLECTION de STADSHOF (P.B.) déposées au MUSÉUM du Dr GUISLAIN à Gand (B)
         MUSÉES ROYAUX D'ART et D'HISTOIRE de BRUXELLES (B)
         LA MUSGRAVE - KINLEY OUTSIDERS FOUNDATION (IRL) (GB)
         MUSÉE JEAN LURÇAT et de la TAPISSERIE CONTEMPORAINE D'ANGERS (F)
         F.N.A.C. (Fonds National d'Art Contemporain PARIS) en dépôt à « LA PISCINE » de ROUBAIX (F)
         F.R.A.C. (Fonds Régional d'Art contemporain Haute Normandie) (F)
         MUSÉE D'ART & DÉCHIRURES SOTTEVILLE-LEZ-ROUEN (ROUEN) (F)
         MUSÉE D'ART BRUT de MONTPELLIER (L'ATELIER-MUSÉE) (F)
         FAISEM fondation d'Aides Publiques et d' Intégration Sociale ANDALOUSIE / SÉVILLE (ES)
         MUSÉE D'ART NAÏF et D'ARTS SINGULIERS de LAVAL (F)
         MUSÉE ET JARDINS Cécile Sabourdy VICQ-SUR-BREUILH (LIMOGES) (F)
         MUSÉE DE LA POSTE - PARIS (F)
         L.a.M. : collection du Musée « ART MODERNE » de VILLENEUVE D'ASCQ (F)
         Et dans de nombreuses collections privées.






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